C’est la fin d’un long processus législatif qui va enfin permettre aux mutuelles de disposer d’un même outil de régulation que les assureurs et les institutions de prévoyance. En effet, l’Assemblée nationale a définitivement adopté, le 19 décembre, la proposition de loi sur les «modalités de mise œuvre des conventions conclues entre les organismes d’assurance maladie complémentaire et les professionnels, établissements et service de santé», déposée par le député socialiste (Seine-Saint-Denis) Bruno Le Roux.
Cette loi met fin à l’interdiction pour les mutuelles d’améliorer le remboursement de leurs adhérents lorsqu’ils consultent un professionnel de santé avec lequel leur mutuelle a conclu une convention, interdiction s’appliquant seulement aux mutuelles et résultant d’un arrêt de la cours de cassation de mars 2010.
Ce texte a été adopté, en première lecture, par l’Assemblée nationale le 29 novembre 2012, puis par le Sénat le 24 juillet dernier. Le soutien décisif de plusieurs parlementaires et la persévérance du mouvement mutualiste ont ainsi permis d’aboutir.
Concrètement, la loi modifie l’article 112-1 du Code de la Mutualité pour autoriser les mutuelles à moduler leurs remboursements selon que l’adhérent consulte, ou non, un «professionnel de santé, un établissement de santé ou un service de santé avec lequel les mutuelles, union et fédération ont conclu une convention». Toutefois, poursuit le texte, ces conventions «ne peuvent comprendre aucune stipulation portant atteinte au droit fondamental de chaque patient au libre choix du professionnel, de l’établissement ou du service de santé et aux principes d’égalité et de proximité dans l’accès aux soins».
Tarifs maîtrisés, qualité des soins
Pour la Mutualité, cette avancée législative «marque la fin d’une véritable anomalie», indique-t-elle dans un communiqué. En effet, dans un arrêt datant de 2010, la Cour de Cassation a rappelé que les mutuelles n’avaient pas la possibilité de moduler leurs prestations dans le cadre de conventions passées avec des professionnels de santé. Cette situation entraînait de fait une distorsion de concurrence avec les compagnies d’assurances et les institutions de prévoyance, privant surtout les mutuelles d’un outil indispensable pour diminuer sensiblement le reste à charge de leurs adhérents.
Comme l’a d’ailleurs rappelé Fanélie Carrey-Conte, députée socialiste de Paris et rapporteure de la commission des Affaires sociales lors du débat parlementaire, les réseaux permettent de réduire la facture des soins de plusieurs centaines d’euros.
Depuis l’arrêt de la Cour de Cassation, de nombreuses institutions ou organismes avaient plaidé pour le développement des réseaux. Ainsi, dans son rapport 2010 sur la Sécu, la Cour des comptes a considéré qu’en matière de soins dentaires, où les restes à charge sont élevés, les réseaux permettraient aux mutuelles de «jouer le rôle d’acheteurs de soins intelligents «.
Grâce aux conventions passées avec les professionnels de santé, les adhérents des mutuelles bénéficient, en effet, de tarifs maîtrisés, d’engagement de qualité des soins et du tiers payant, notamment. Dans son argumentaire, la plus haute juridiction financière s’appuyait sur un avis de l’Autorité de la concurrence de 2009, pour qui les réseaux ont un » effet pro-concurrentiel, donc favorable à l’amélioration de la qualité et à la baisse des prix».
L’Inspection générale des Affaires sociales (Igas) et l’Inspection générale des finances (IGF) ont émis des recommandations identiques en 2012. Dernier avis en date celui du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance maladie (Hcaam), publié le 18 juillet 2013, dans lequel cet organisme pointait «l’intérêt» des réseaux «pour modérer les tarifs dans les secteurs de la liberté tarifaire tout en respectant la qualité des soins».
Des réseaux réservés aux opticiens, dentistes et audioprothésistes
Toutefois, le texte adopté par le Parlement limite le domaine d’application des conventions car la modulation des prestations ne pourra s’appliquer que pour les professionnels de santé «dont le financement par l’assurance maladie est inférieur à 50%». Une restriction que «regrette» la Mutualité Française. Dans les faits, des conventions pourront être passées avec des opticiens, des dentistes ou des audioprothésistes. Rappelons que le régime général ne rembourse que 18% des dépenses engagées pour les prothèses dentaires et seulement 4% pour l’optique.
Avec ce texte, le législateur «souligne le rôle indispensable des mutuelles dans le système de santé […]», se félicite la Mutualité Française. «Les mutuelles s’engagent à mettre en œuvre les bénéfices du dispositif proposé par la loi Le Roux tant pour les adhérents que pour les professionnels de santé concernés afin de démontrer son utilité pour tous les acteurs», poursuit-elle.
Source Mutualité Française